Nous retrouverons dans les lectures dominicales la figure de Cyrus, évoqué par le prophète Isaïe comme le Roi que Dieu « a pris par la main » pour accomplir son dessein : libérer son peuple déporté à Babylone. Nous entendons dans les media depuis plusieurs semaines, cette évocation utilisée par les chrétiens conservateurs pour justifier leur soutien électoral au président Donald Trump, qui réalise leurs souhaits alors qu’il est loin d’être comme il faut, un fidèle humble, pieux et charitable, et que les dégâts produits par sa présidence aux États-Unis et dans le reste du monde occupent une place majeure à l’approche des élections US. Cela nous renvoie à la « La terreur ubuesque, la souveraineté grotesque » décrites il y a déjà quelque décennies par le philosophe Michel Foucault traitant du pouvoir absolu de Néron à Mussolini : si je reçois des bénéfices du pouvoir peu m’importe celui qui l’exerce, et tant mieux s’il s’en montre indigne car je n’ai même plus à le respecter, seul compte mon intérêt. Ce qui d’ailleurs n’était pas le cas de Cyrus, bien plus attentifs aux populations déplacées et réfugiées que ne le sont aujourd’hui Donald Trump et les gouvernements européens. La réponse de Jésus aux pharisiens qui tentent de le prendre au piège sur la situation politique de l’époque pourrait conforter ces chrétiens trumpiens : rendre à César ce qui est à César pourrait signifier laisser le chef à ses turpitudes pendant que nous nous rassemblons pour prier Dieu. Ce raisonnement sonne faux, Jésus ne justifie ni n’excuse le pouvoir, il le remet à sa place, c’est-à-dire entre les mains de Dieu, ce qu’il dira à Pilate : « Tu n’aurais sur moi aucun pouvoir s’il ne t’avait été donné d’en-haut », et Dieu lui-même place ce pouvoir entre nos mains car il nous rend libres et responsables de nos vies. Ayant rendu à ses détracteurs pharisiens le denier qu’ils lui ont tendu Jésus poursuivra la polémique avec les sadducéens à propos de la résurrection, « Dieu est le Dieu des vivants », et avec les lévites à propos de la loi, « aimes ton prochain comme toi-même ». Dans le tourbillon des polémiques qui nous emportent en ce moment savons-nous comme Jésus toujours garder les repères de la Justice, de la liberté et de l’amour, savons-nous avoir une parole vraie et vivante ?
Père Jacques Mérienne, Vicaire de Saint-Eustache