Bien sûr la majorité des prêtres sont dévoués et désintéressés.
Mais c’est toujours la même histoire : celui qui s’enferme dans ses certitudes ne peut même plus ouvrir les yeux ; et il s’enferme dans le déni, tant pis pour la vérité, tant pis pour l’innocence !
Vous avez bien compris que je vous parle des prêtres du temple de Jérusalem et de l’accueil qu’ils ont fait à l’aveugle né guéri par Jésus…
Si vous avez cru que je parlais d’autre chose,
Par exemple de ce qui se passe aujourd’hui dans notre Église,
C’est que comme nous tous vous êtes assaillis par les réactions, sous forme d’articles, de reportages, d’éditoriaux, et même de livres, mais surtout de conversations
auxquelles on ne peut échapper en ce moment, c’est vraiment la chose dont on parle, et heureusement… Enfin !
Ce que je pourrais vous dire au sujet de la crise qui traverse notre Église vous le savez donc déjà même si vous n’avez pas tout lu ni tout entendu
Nous le savons par le trouble dans notre cœur et par nos questions qui restent encore sans réponses
Difficile d’ailleurs d’appeler « crise » ce qui dure depuis des décennies !
Il s’agit plutôt d’une prise de conscience subite de la dissimulation de crimes commis par ceux qui auraient dû en protéger les victimes.
Nombreux sont en tout cas ceux qui parlent de tristesse, de déception, de honte et de colère, et même parfois d’une forme de culpabilité d’avoir pu « laisser faire » de telles atrocités.
Mais c’est trop tard, ce qui se passe rend le langage de l’Église presque totalement INAUDIBLE. Ce qui lui restait d’autorité n’est plus crédible.
Nous sommes dépossédés de nos louanges parce que dans ce contexte elles sonnent faux
Nous sommes dépossédés de nos silences parce que dans ce contexte ils semblent coupables
Mais revenons à l’Évangile de Jean.
Comme à son habitude quand il se lance dans un grand récit, il commence par dévoiler le sens de l’énigme que ce récit illustre.
Jésus croise le chemin d’un homme aveugle, lui et ses parents, répond-il à ses apôtres, sont innocents bien sûr, «mais c’est pour que les œuvres de Dieu se manifestent en lui »
Car Jean insiste bien pour nous faire comprendre qu’il y a deux sortes d’aveuglement : la cécité naturelle, qui est le lot de cet homme depuis sa naissance, et puis, beaucoup plus grave, l’aveuglement du cœur, qui est le lot des prêtres.
Car c’est toujours la même histoire : celui qui s’enferme dans ses certitudes ne peut même plus ouvrir les yeux ; il demeure dans les ténèbres quand bien même il prétend servir la foi, mais alors les œuvres de Dieu ne peuvent se manifester en lui.
Par contre celui qui fait un pas sur le chemin de la foi est prêt à accueillir la lumière, à recevoir de Jésus la véritable lumière.
Lors de sa première rencontre avec l’aveugle, Jésus a fait le geste qui le guérit de sa cécité naturelle. Lors de sa deuxième rencontre, c’est le cœur de l’aveugle que Jésus ouvre à une autre lumière, la vraie lumière.
« Crois-tu au fils de l’homme ? — Qui est-il Seigneur ? — Tu le vois, c’est Lui qui te parle — Je crois Seigneur ! »
À partir de ce moment l’ancien aveugle devenu voyant devient aussi un témoin
C’était valable pour l’aveugle et les disciples de Jésus, c’est valable pour nous
Celui qui fait un pas sur le chemin de la foi est prêt à recevoir de Jésus la véritable lumière.
Pour nous l’image de la justice n’est pas une femme les yeux bandés et tenant dans ses mains la balance des compromis,
Pour nous l’image de la justice c’est la LUMIÈRE, lumière qui dévoile la vérité, lumière qui protège l’innocence, lumière qui donne la vraie liberté et la vraie joie, lumière qui répand l’amour.
Je reprends ce que je disais en entrée, mais cette fois pour aujourd’hui : Oui la majorité des prêtres sont dévoués et désintéressés.
Je n’irais pas jusqu’à dire qu’ils sont tous des saints parce qu’au fond cela est secondaire. Ce n’est pas parce qu’un prêtre est saint comme le curé d’art ou saint Vincent de Paul qu’il est un bon prêtre, bien sûr ça ne gâte rien, mais c’est son histoire avec Dieu.
Un prêtre est un bon prêtre parce qu’il est en communion avec ses frères prêtres et que cette communion repose sur la communion avec tous les baptisés
Et surtout que les baptisés soient en communion avec toute l’humanité. Rien que ça !
Toutes ces communions qui se complètent, cela peut paraître lourd et difficile à comprendre, mais on peut simplifier, car au fond c’est très simple, ces communions se confondent au point de n’en faire qu’une dans le Christ qui est notre UNITÉ.
Et tous ensemble nous manifestons les œuvres de Dieu
Alors que faire aujourd’hui : surtout NE PAS DESERTER !
Mais Devenir une MAISON SURE, une maison qui accueille le plus vulnérable
L’enfant bien sûr, mais aussi l’étranger, le malade, le sans logis, le prisonnier
L’Église, et donc à notre échelle LA PAROISSE, n’est pas là pour elle-même
Mais justement pour se mettre au service de l’enfant, de l’étranger, du malade, du sans logis, du prisonnier
Devenir une maison lumineuse et libre, d’une liberté qui n’enlève rien à la fraternité ni à la loyauté
Devenir une maison qui donne le goût de vivre, la joie de vivre spécialement aux plus fragiles
Une maison dont les fondations sont le Sacerdoce commun des baptisés
Mais NE PAS DESERTER implique sans doute une part de révolte
La révolte a sa place dans l’acte de foi !
Sinon comment les disciples de Jésus, à commencer par l’aveugle qu’il a guéri, auraient-ils pu remplir leur mission ?
Je reprends les mots de François Perrot dans l’éditorial de la FIP de cette semaine :
« Si l’Eglise comme organisation est en crise, l’Eglise-ecclesia que nous formons,
elle doit prendre la mesure des crises ouvertes, en parler,
accepter de repenser comment nous « faisons Eglise » et comment être authentiquement chrétiens aujourd’hui »
Communion, Innocence et Fidélité
Nous n’y parviendrons pas sans un profond changement de mentalité
« Je suis venu en ce monde pour rendre un jugement : que ceux qui ne voient pas puissent voir, et que ceux qui voient deviennent aveugles. » nous dit Saint Jean
« Dans le Seigneur, vous êtes lumière ; conduisez-vous comme des enfants de lumière » nous saint Paul.