Enfin le carême ! Et que personne ne voie là un enthousiasme un peu curieux pour un période réputée austère. C’est tout le contraire : avec le mercredi des cendres, la semaine prochaine, s’ouvre une période propice pour faire le point et se recentrer.
Nous connaissons les mots d’ordre du carême, proposés par l’évangile selon Matthieu qu’ont lit alors : prier, jeûner partager, chemin d’ascèse (entendez « exercice » et non pas seulement « pénitence ») à la valeur éprouvée tant au point de vue diététique que pour l’hygiène mentale et spirituelle.
Mais pour s’engager dans ce chemin il faut sans doute commencer par ralentir, retrouver le sens du temps pour ne pas dire la grâce du temps. Et c’est alors que l’on peut aussi retrouver le sens de la profondeur dans un monde ou la vitesse du tgv le dispute à celle du zapping et condamne à ne connaître que la surface des choses. C’est alors aussi que l’on peut retrouver le goût d’une vraie lucidité, d’un regard propre et personnel sur les choses au lieu de se laisser entraîner par l’obligation de penser avec la masse et selon les modes, les engouements ou les détestations du moment.
La quarantaine quadragésimale, sur horizon de célébration pascale, se propose comme une opportunité pour réinvestir notre acte de foi et notre art d’être disciples. Un auteur nous livre une réflexion sur la foi dont « l’aspect le plus immédiat et le plus simple est la confiance. Mais celle-ci peut entraîner une authentique conversion, un véritable retournement, un changement de perspective, une nouvelle manière de prendre appui pour exister. La découverte de l’amour de Dieu, ou du Christ et de son Évangile, et l’ouverture aux autres que cette découverte suscite, induisent dans le cœur des croyants un nouvel appétit de connaissance, l’urgence du don de soi, l’impatience de l’avènement du Royaume, des élans de générosité ». On l’aura compris le carême – invitation renouvelée à la conversion – peut être tout autre chose qu’un long et morose moment à passer. Il peut être, à l’opposé d’un temps d’attrition ou d’amoindrissement, un temps de dilatation du cœur et un temps privilégié de renouvellement dans nos engagements, quels qu’ils soient.
Aucune recette ne sera fournie au moment de prendre le départ. À chacun, chacune, de se donner rendez-vous avec soi-même pour faire de ce temps, vraiment, un temps heureux, un temps favorable !
Gilles-Hervé Masson, dominicain, vicaire à Saint-Eustache.