Au moins cette année quand nous nous souhaitons « Joyeux Noël ! » ce n’est pas une formule creuse. Nous mettons dans notre souhait tout le ressenti de ces jours, de ces semaines, de ces mois en dehors des clous, en dehors des habitudes que nous avons dues abandonner ou suspendre, en dehors des liens et des relations que nous avions avec les uns et les autres, proches ou professionnels, en dehors de nos divertissements ou pratiques culturelles, ou pratiques sportives, et qui ont volé en éclat… en dehors de ce qu’était en somme notre manière de vivre, en dehors de ce qu’était notre incarnation. Ainsi cette année quand nous nous souhaitons « Joyeux Noël ! » nous pensons à nous réincarner dans une vie qui récupère l’essentiel de la nôtre et y incorpore la nouveauté et l’inattendu de la situation actuelle. Nous redécouvrons que l’incarnation ne consiste pas à se couler dans un moule tout fait, mais qu’il faut au contraire pour cela sortir, partir, lâcher prise. C’est à l’image de la naissance de Jésus à Bethléem en marge de la vie de ses parents qui ont dû quitter Nazareth, en marge de la vie du village trop plein pour les accueillir, en marge de la vie de son peuple soumis aux pouvoirs politiques opprimants et en lutte. S’incarner est donc une création car il faut intégrer des éléments de vie nouveaux, non maîtrisés, mais stimulants. En sortant de ces fêtes de Noël notre chemin sera encore chaotique pendant quelques mois, pour nous comme pour ceux avec qui nous vivons, pour nous comme pour nos concitoyens, alors que ces fêtes et ces célébrations nous permettent de prendre de l’élan, de la force, et la liberté qu’il nous faut pour affronter des situations difficiles et exigeantes. Nous recueillir devant la crèche n’est pas une parenthèse, mais un engagement à vivre ensemble et fraternellement les temps qui viennent.

JOYEUX NOËL !