Qu’est-ce qu’a été cette année de la poésie à Saint-Eustache et à Cerise, initiée par le père Yves Trocheris ?
Un engagement, un travail, un chemin vers le mot poétique, cette « parole première » selon Karl Rahner, qui nous est donnée, que le poète reçoit et connait. Nous avons essayé d’approcher, de percevoir le mystère de cette parole.
Essayons de nous rappeler ce que nous avons entendu ou vu au cours de tous ces mois.
L’année s’est ouverte par la conférence de Madame Zimmermann dans l’église : une interrogation sur ce qu’est la poésie pour nous aujourd’hui, au cours de laquelle nous avons pu écouter des poèmes espagnols lus par Marcia De Castro ; leur musique nous a aidés à apprécier les propos tenus.
Souvenons-nous aussi de cet après-midi consacré à Withman lu par Nicole Stern, John Davidson et Peter Nichols et chanté par Olivier Fourcade : deux langues se sont mêlées, deux musiques se sont enlacées, celle des mots et celle du piano tenu par Lionel Cloarec. C’était une découverte, pour moi du moins…
Quel joli moment aussi, lorsque les enfants du catéchisme nous ont livré leurs poèmes illustrés par leurs soins !
Dans un tout autre style, l’église a été le cadre d’un récital de poésie spirituelle grâce à la lecture de Philippe Le Guillou, accompagné par les prodigieuses improvisations de Thomas Ospital. Ce fut un moment très fort de beauté et de spiritualité, consacrée à la recherche fondamentale de l’homme dans sa quête de Dieu.
Et puis quelle heure étrange et si douce avons-nous vécu lors de la lecture à deux voix des poèmes de Christelle Andréa et de la comédienne Aura Coben, soutenue par le Jeune Chœur de Christopher Gibert avec à l’orgue Thomas Ospital. Au creux de la forêt des piliers de Saint-Eustache, elle nous a introduits dans cette autre forêt, naturelle et bruissante, moment d’une paix attendue et d’un silence sous-jacent.
La veillée Sainte Geneviève ? Elle a sa place dans le déroulement de tous ces événements car elle était sous le signe de la poésie, alliance d’une sainte et de sa ville, Paris. Poésie très variée, allant d’Erasme à Péguy jusqu’à Baudelaire et Aragon. Que dire des chanteurs dirigés par Stéphane Hézode ?
C’était merveilleux… et quelle joie quand nous les avons entendus terminer par du Mireille Matthieu !
Il y eut un soir où Marcia De Castro et sa troupe nous ont offert un spectacle sur les femmes, leurs vies, leurs combats, leurs tendresses, qu’elles ont introduits par des poèmes en portugais, en berbère, en français : une heure émouvante de sincérité et de paroles vécues, servis par leur talent.
Arriva le moment où plus rien n’était faisable comme avant, c’était le confinement. Tout était donc à inventer pour que, malgré tout, la dernière performance proposée à Saint-Eustache soit visible par tous.
Grâce à une vidéo mise en ligne, Raphaël Cottin et Jean Guizerix ont pu donner à voir quelques improvisations extraordinaires où le geste naissait de la parole et où inversement le corps donnait naissance à la parole ; un passage de L’Apocalypse introduisait cette révélation si mystérieuse : expérience du silence, conjugaison du mot et du corps.
Pendant tous ces mois, de l’autre côté de la rue Etienne Marcel, à Cerise, il se passait tant de choses, en lien avec la poésie !
Il y eut une exposition de Marie-Sylvie Rivière « Paysages imaginaires », un concert de chants et poésies « O genty joli verre ! », une exposition intitulée « De ce mur qui se dresse » par Henri Fallet poète et la plasticienne Geneviève Trivier et pour finir un concert poétique par les musiciens du Conservatoire Mozart et des lecteurs poètes.
On peut évoquer également les poèmes publiés par Cerise et Saint-Eustache, soit en ligne, soit sur la feuille d’information paroissiale.
Alors comment conclure cette année de la poésie ? Nous avions des projets de fête inaugurant la joie de la Pentecôte… impossible évidemment vues les difficultés du moment.
Commençons en tout premier lieu par remercier tous les artistes qui nous ont donné leur talent afin de nous accompagner sur notre chemin de poésie. Grâce à eux et à leur engagement, ils nous ont aidés à vivre la force créatrice de la parole.
Mais à vrai dire, peut-on conclure une telle année ? La poésie, le mot, la parole continuent d’habiter nos vies. Il faut lire et relire Baudelaire, Rimbaud, René Char, Rilke et tant d’autres… Chaque heure a ses découvertes.
Et pour finir, cette phrase de René Char :
« La poésie est ce fruit que nous serrons, mûri, avec liesse, dans notre main, au même moment qu’il nous apparaît, d’avenir incertain, sur la tige givrée, dans le calice de la fleur. »
Martine de Groote
Membre de l’équipe pastorale
Visitez la photothèque de l’Année de la Poésie : https://flic.kr/s/aHsmMcTNeH