Lundi de la 2ème Semaine du Temps Pascal
« Personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit, ne peut entrer dans le royaume de Dieu »
Évangile de Jésus Christ selon saint Jean 3, 1-8
Il y avait un homme, un pharisien nommé Nicodème ;
c’était un notable parmi les Juifs.
Il vint trouver Jésus pendant la nuit.
Il lui dit :
« Rabbi, nous le savons,
c’est de la part de Dieu que tu es venu
comme un maître qui enseigne,
car personne ne peut accomplir
les signes que toi, tu accomplis,
si Dieu n’est pas avec lui. »
Jésus lui répondit :
« Amen, amen, je te le dis :
à moins de naître d’en haut,
on ne peut voir le royaume de Dieu. »
Nicodème lui répliqua :
« Comment un homme peut-il naître
quand il est vieux ?
Peut-il entrer une deuxième fois dans le sein de sa mère
et renaître ? »
Jésus répondit :
« Amen, amen, je te le dis :
personne, à moins de naître de l’eau et de l’Esprit,
ne peut entrer dans le royaume de Dieu.
Ce qui est né de la chair est chair ;
ce qui est né de l’Esprit est esprit.
Ne sois pas étonné si je t’ai dit :
il vous faut naître d’en haut.
Le vent souffle où il veut :
tu entends sa voix,
mais tu ne sais ni d’où il vient ni où il va.
Il en est ainsi
pour qui est né du souffle de l’Esprit. »
Méditation du frère Gilles-Hervé Masson
Aujourd’hui encore la Résurrection du Christ nous est proclamée. Et elle l’est comme au premier jour, comme dimanche dernier lorsque nous célébrions le grand et saint jour de Pâques. Et il en sera ainsi au long de ces sept dimanches qui vont se succéder et baliser le temps qu’on appelle « pascal ». Temps particulier de la première annonce et qui nous est donné pour que nous nous laissions rejoindre par la surprenante nouvelle : “Christ est ressuscité !”
Tous ces dimanches à venir sont bien des dimanches “de pâques”. Et ces temps et ces moments ne jalonnent pas un mouvement d’éloignement du moment originel : comme si Pâques disparaissait dans la brume du souvenir d’un jour tout particulièrement heureux. Pas davantage ces temps et ces moments ne sont-ils comme un sur-place qui refuserait, au contraire, de quitter ledit “jour heureux et béni”. Plus simplement, ces temps et ces moments sont inscrits dans le temps réel de nos vies, un temps qui, nécessairement passe, mais qui nous offre la possibilité de garder la mémoire de ce qui a été vécu, de l’actualiser même en scrutant et en écoutant, encore et encore les récits qui nous le rapportent, en revenant sur la manière dont l’ont vécu les premiers témoins (expérience des femmes au tombeau, expérience des disciples d’Emmaüs, des apôtres retrouvant le Seigneur après sa résurrection…)
Pour autant, on l’a vu à maintes reprises et on peut s’en étonner : ce que l’annonce de la résurrection suscite en premier lieu c’est plutôt du scepticisme, de la peur aussi, du refus. Il suffit de relire la finale de l’Évangile selon saint Marc (que nous lisions avant hier), ou bien l’évangile « de Thomas » (que nous lisions hier)… Alors qu’en est-il de nous ?
Nous savons bien qu’en définitive il s’agit de se laisser rejoindre par ce mystère que l’on ne comprend ni en une seule fois ni en plusieurs fois mais dont le sens et la force se révèlent tout au long d’une longue fréquentation de l’Heureuse annonce : « Christ est ressuscité ! » Ici on peut repenser pertinemment aux rencontres de Jésus dont nous avons été témoins durant le carême (Samaritaine, Aveugle-né, Marthe, Marie, Lazare…) et nous pouvons transposer pour nous-mêmes : que signifie la résurrection lorsque ma quête spirituelle ne sait plus trop ou elle va ou bien lorsque les liens qui font ma vie ne sont pas assez harmonieux ? Que signifie la résurrection lorsque je suis dans le noir dans ma vie et parfois dans ma foi ? Que signifie la résurrection lorsque, comme pour Marthe et Marie, la mort vient endeuiller mon âme et me voler ceux ou celles que j’aime ? Et on pourrait décliner encore. Chacun, chacune pourra le faire selon son tempérament, selon son expérience ou ses expériences au fil du temps et de l’existence…
Ce que l’on peut se dire c’est que la résurrection ne cesse de nous interroger. Elle nous accompagne chemin faisant comme une proclamation qui nous déconcerte. Elle nous remet sans cesse devant notre vocation à « vivre en ressuscités » (selon les mots de Paul) et cela nous est comme une question mais comme une question lumineuse : « vivre en ressuscité, qu’est ce que cela peut vouloir dire pour moi, maintenant ? »
Frères et sœurs, chers amis, ceux et celles qui composent le corps du Christ ressuscité, l’Église de Dieu, sont ceux et celles qui cheminent en portant à la fois l’heureuse annonce (de la résurrection) et, bien sûr, tous les questionnements qui les habitent, les travaillent et peut être parfois les tourmentent. L’important est que ces questionnements ne soient pas fermés à l’Heureuse annonce mais qu’au contraire cette Heureuse annonce, l’Évangile du Ressuscité, nous aide à habiter nos questionnements, nos doutes parfois ou même nos douleurs pour que la lumière, la vie et l’amour aient toujours le dernier mot.
Amen. Alléluia.