“Comme jamais auparavant dans l’histoire, notre destin commun nous invite à chercher un nouveau commencement (…)”, le pape Francois.
Laudato Si’ part d’un paradoxe très actuel : nous vivons dans et de la création “en tant que créature d’un Créateur aimant”, et en déphasage avec elle. Nous poursuivons notre guerre avec la planète dont nous dépendons. Ainsi, l’observatoire européen Copernicus vient de mesurer à 1.6° la hausse de la température en 2024 par rapport à la période pré-industrielle ; c’est 30% de la différence de température entre une ère glaciaire et une ère interglaciaire. C’est pourquoi le pape François nous invite à une triple transformation en profondeur : enrichir joyeusement notre relation au mystère de la création, réexaminer nos manières de voir les choses à tous les niveaux, en tirer les conséquences pratiques dans nos actions individuelles et collectives.
Alors que nous professons régulièrement notre foi en un Dieu créateur, il nous est proposé de développer notre esprit de famille avec “la grande famille de la création” et d’assumer notre interdépendance avec tous ses membres proches ou lointains. Il est plus facile d’être attentif aux innombrables cadeaux dans lesquels elle consiste, de les accepter, de s’en émerveiller si on garde ses distances par rapport aux images formatées, au flux continuel d’images prenant acte du pillage ordinaire de la planète présentée comme un simple stock de ressources.
Nous savons que la création se poursuit aussi avec les 2 kg de bactéries que nous hébergeons et qui peuplent entre autres choses nos tubes digestifs et nous protègent. On peut aussi s’émerveiller du fait que nos lointains parents les poissons ont laissé leur empreinte dans notre système sanguin ; nous leur devons la forme surprenante de l’aorte qui fait un tournant à 180°.
En résumant au chapitre I le consensus scientifique, Laudato Si’ nous donne d’emblée une idée claire de nos contradictions. Se savoir impliqués dans des sociétés hors sol et hors limite, c’est aussi prendre conscience de l’ampleur des marges de manœuvre et des nombreux leviers d’action disponibles. Pour sortir de ces contradictions, le chapitre III propose donc un inventaire de nos manières de voir. Il analyse nos imaginaires en allant à la racine des choses et jusqu’au constat d’une “unique crise sociale et environnementale” qui invisibilise autant les pauvres que la nature. Il s’agit alors de déconstruire des croyances et de résorber des automatismes, dans le cadre d’une “révolution culturelle courageuse” pour développer une écoute conjointe du “cri de la terre et du cri des hommes”.
En découle la reconnexion de chacun avec la création, c’est à dire en pratique le respect de la capacité de charge de la planète : “le moment est venu de prêter de nouveau attention aux limites qu’elle impose” (LS 116). S’appuyer sur elles revient à adapter ses empreintes, revoir les flux de matières et d’énergies à tous les niveaux, et revisiter ses rôles de producteur, consommateur ou citoyen. Laudato Si’, dont c’est le 10e anniversaire, ne donne pas de recette mais analyse de nombreux terrains d’action (chap.IV à VI). A chacun donc de choisir sa manière de prendre soin de la maison commune et d’inventer ses nouveaux récits susceptibles de faire boule de neige par ses actions individuelles et collectives.
Le groupe Eglise verte de Saint-Eustache