(La nature) représente d’abord le cadre de vie de l’espèce humaine : ce milieu terrestre auquel l’humanité est attachée et dont elle dépend.(…) Mais la nature est aussi à l’inverse, l’endroit où saisir le sentiment de l’illimité et de l’informe, lorsque par exemple des forces tumultueuses s’y déchaînent : sauvage et déréglée, elle suscite l’idée du sublime et vient alimenter le « grand dire » du lyrisme.(…) Il y a en elle un modèle de justesse dont les humains doivent retenir la leçon, au lieu de se leurrer de faux biens et de chercher toujours à satisfaire leur faim de l’or et du pouvoir.

Jean-Michel Maulpoix, Les cent mots de la poésie

Une Goutte tomba sur le Pommier –
Une autre – sur le Toit –
Cinq ou Six embrassèrent le Rebord –
Et firent rire les Pignons –

Une poignée alla renforcer le Ruisseau
Qui alla renforcer la Mer –
Moi J’Imaginais si c’étaient des Perles –
Quels Colliers elles feraient –

La Poussière revint, Sur les Chemins Ravivés –
Les Oiseaux chantaient plus joyeux –
Le Soleil lança au loin son Chapeau-
Les Buissons – jetaient des feux –

Les Brises apportant des Luths moroses –
Les baignèrent dans l’Allégresse –
Puis l’Orient montra un unique Drapeau
Et marqua la Fin de la Fête –

A Drop fell on the Apple Tree –
Another – on the Roof –
A Half a Dozen kissed the Eaves –
And made the Gables laugh –

A few went out to help the Brook
That went to help the Sea –
Myself Conjectured were they Pearls –
What Necklaces could be –

The Dust replaced, in Hoisted Roads –
The Birds jocoser sung –
The Sunshine threw his Hat away –
The Bushes – spangles flung –

The Breezes brought dejected Lutes –
And bathed them in the Glee –
Then Orient showed a single Flag
And signed the Fete away –

Emily Dickinson

 

* Visuel : Œuvre d’Evi Keller Matière-Lumière [Towards the Light – silent transformations] n°4654, 2010